Point sur la Proposition de Loi Sécurité Globale

par | 26 Mar 2021 | Commission des Lois, Proposition de Loi, Sénat

Point sur la Proposition de Loi Sécurité Globale

26-Mar-2021 | Commission des Lois, Proposition de Loi, Sénat

Examen au Sénat de la proposition de loi relative à la sécurité globale.

Ce texte a été initialement destiné à renforcer la complémentarité des forces de sécurité et a été complété par de multiples ajouts du Ministère de l’Intérieur et a pâti de l’absence d’étude d’impact et de saisines du Conseil d’Etat et de la CNIL.

Une focalisation sur l’article 24 de la proposition de loi renforcée par une rédaction heurtant la liberté de la presse et des initiatives gouvernementales visant à minorer le rôle du Parlement. Les débats dans la presse et l’opinion publique ont été particulièrement vifs sur cet article. La volonté de mettre en place un dispositif protégeant les forces de l’ordre contre la diffusion de leur identité à l’occasion de leurs interventions s’est heurtée à la crainte d’une entrave à la liberté d’information.

Le Gouvernement a soumis au Parlement deux textes parallèles pour traiter de la question de la diffusion des données personnelles sur les réseaux sociaux, l’article 24 et l’article 18 du projet de loi tendant à conforter les principes républicains, élaboré par le Ministère de la Justice après l’assassinat de Samuel Paty.

Le périmètre de l’article 24 est plus circonscrit puisqu’il réprime la diffusion malveillante de l’image du visage ou des données identifiantes des forces de l’ordre.

L’article 18 est plus large puisqu’il réprime la diffusion de données permettant l’identification ou la localisation de toute personne dans le but de lui nuire, à elle ou à sa famille.

Face à la contestation sur l’article 24, la majorité de l’Assemblée Nationale n’a pas jugé utile de le modifier en commission, mais a adopté en séance un amendement du Gouvernement et l’ensemble du texte. Le Premier ministre annonçait la création d’une commission spéciale chargée de la réécriture de l’article 24 ; pour ensuite annoncer qu’elle ne présenterait pas de texte.

 Le 8 décembre 2020 le Président de la République annonçait le lancement d’un Beauvau de la sécurité destiné à « améliorer les conditions d’exercice » et à accélérer la transformation engagée ».

Malgré la multiplication des initiatives, les rapporteurs n’ont eu communication d’aucun texte émanent du Gouvernement.

Avec le Président du Sénat, nous nous sommes trouvés donc confortés dans l’idée que seul le travail de la navette parlementaire et la discussion successive par les deux chambres du Parlement tel que fixé par la Constitution permet l’élaboration efficace d’un texte de loi.

La proposition de loi aborde la question du continuum de sécurité au travers de plusieurs thématiques.

Le premier volet du projet de loi qui comprend 12 articles vise à accompagner la montée en puissance des polices municipales et à élargir leur champ d’action. Il est proposé de procéder, à titre expérimental et dans certaines communes, à un élargissement de leurs prérogatives judiciaires.

La proposition de loi comporte 22 articles relatifs au secteur de la sécurité privée. Ce secteur regroupe différents métiers régis par le live VI du code de la sécurité intérieur. Il a connu une importante montée en puissance depuis une trentaine d’années et compte aujourd’hui 177 000 salariés et 11 500 entreprises pour un chiffre d’affaires global de l’ordre de 7,5 milliards d’euros.

En 2012, un établissement public administratif, le Conseil National des Activités Privées de Sécurité (CNAPS) a été créé pour contribuer à professionnaliser et moraliser le secteur. Il n’est pas chargé d’assurer une régulation économique mais assume d’importantes fonctions de police administrative.

Ce texte tend également à moderniser et renforcer les moyens d’action de nos forces de sécurité afin de mieux tirer parti des nouvelles technologies de captation des images. Le recours à la vidéoprotection, caméras mobiles ou caméra piéton, permet la transmission en direct des vidéos vers des centres de commandement en cas de danger ; il autorise le visionnage immédiat des images pendant l’intervention ; et il permettrait désormais aux forces de sécurité de participer à une véritable « guerre médiatique » en diffusant les images de leurs propres interventions directement dans les médias ou sur les réseaux sociaux.

Concernant les caméras aéroportées ou drones, le texte crée une nouvelle base légale spécifique pour mettre fin aux incertitudes juridiques nées après deux décisions du Conseil d’Etat et une sanction de la CNIL ayant interdit leur usage pour des finalités d’ordre public. Une base juridique similaire pour les caméras embarquées dans des véhicules est également prévue.

Outre l’article 24, l’article 23 entend supprimer les remises automatiques de peines pour les auteurs d’infractions contre plusieurs catégories d’agents publics.

Tout en partageant la nécessité d’un renforcement du continuum de sécurité qui passe par une meilleure articulation entre polices municipales, police nationales et gendarmerie, la montée en compétence de la sécurité privée et l’usage de nouvelles technologies, la commission a estimé que ces évolutions ne pouvaient être que mesurées à l’aune de la protection des libertés publiques.

En tant que président de la Commission des Lois, j’ai saisi la CNIL de la proposition de loi. Son avis a été remis en janvier dernier et a permis d’élaborer un dispositif d’encadrement du recours aux drones mais aussi de diffusion de l’image des forces de l’ordre qui soit conforme aux principes de protection des données personnelles et de la vie privée.

Sur l’ensemble des aspects du texte, la commission a cherché à renforcer les garanties données aux citoyens tout en facilitant l’action des forces de sécurité.

Tout en partageant les objectifs du texte, la commission a souhaité, « apporter les garanties nécessaires restaurant la confiance entre les forces de sécurité et la société civile ».

Elle a adopté 73 amendements, dont 47 amendements des rapporteurs, Marc-Philippe Daubresse, sénateur du Nord, et Loïc Hervé, sénateur de la Haute-Savoie, tendant en particulier à :

Conforter la police municipale en tant que force de la sécurité du quotidien :

  • Restaurer la confiance entre les forces de sécurité et les citoyens,
  • Clarification du texte sur les modalités de port d’arme en dehors du service

 Mieux structurer les acteurs de la sécurité privée :

  • Ce texte ne privatise pas la police ; aucun pouvoir de police judiciaire n’est confié à des agents de sécurités privés.

Encadrer les nouvelles technologies de captation des images :

  • Encadre l’usage des drones
  • Conformément aux préconisations formulées par la CNIL, la Commission des Lois limite la consultation des images de caméras mobiles des forces de l’ordre.

Mieux protéger les forces de sécurité intérieure :

  • L’article 24 a été réécrit avec un « délit de provocation à l’identification » sans entrave à la liberté de la presse.

 

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